2011/10/22

Le froid prend peur et les prix baissent



  
 À l’approche des villes, flotte dans l’air une odeur déjà senti. C’est l’odeur inimitable du charbon qui brûle et réchauffe les chaumières de la République Tchèque. Cette odeur à mon nez comme une preuve. Passé la frontière s’ouvre à moi un pays qui s’annonce plus pauvre que le dernier. Le froid prend peur comme les prix baissent et bien vite Prague arrive sous mes roues.

 Ville incroyable, surtout superbe. Ville de pavés et des clochers. Les pignons d’églises par dizaines débordent et piquent le ciel. Des châteaux moyenâgeux surplombent la ville sur deux rives que l’on traverse à l’aide de ponts de pierres ou bien d’acier. De grandes places aux monuments fioriturés sont habitées par des statues de bronze mécanisées. De ces grandes places s’étalent des centaines de ruelles casse-têtes. Un centre-ville presque parfait et les rues n’ont aucun sens. Un labyrinthe où des murs sous différentes formes ont remis les tons pastel aux gouts du jour. De sous nos pieds partout des passages, des chemins, des rues et des ruelles faite de pavés. Cubes de pierres par milliers. Polis par la marche du temps, concave par l’histoire.

 Marcher à l’intérieur de Prague et des musiques classiques s’envolent des fenêtres. Se perdre dans Prague, vagabonder des rues piétonnes débordantes d’amoureux d’ailleurs. Des bars d’absinthe pour la jeunesse et des étagères de cartes postales pour ceux qui veulent garder souvenir de quand ils n’y étaient pas.

 Déambuler dans Prague, pour chaque rue une taverne. Souvent dans un sous-sol, surtout de lumière sombre. Une dizaine de tables tout au plus. La pièce se fait opaque par la fumée et la bière y est moins chère que le café. Entre deux pintes, apprendre l’histoire de ce pays. Un pays qui avec un gant de velours tira un trait sur ce régime il y a vingt ans à peine. Un pays nouveau dans une Europe fragile.

 Et souvent je m’éloigne de ton centre pour ce quartier populaire où les murs tatoués de graffitis font preuve de vie. J’y trouve des gens qui vivent entre tes murs. Ils font de leurs quotidiens une ville extraordinaire.

 Prague, tu es si vieille, que caches-tu sous tes pavés. Dans tes entrailles j’imagine des trésors. Que ce trouve-t-il de sous ta peau.

Que caches-tu sous tes pavés…









2011/10/14

L'Allemagne au carré et mon fleuve de chevet!



 Les frontières de par le monde se font d’obstacles naturels. Des grandes montagnes, de longs cours d’eau séparent la terre en vains morceaux. C’est le Rhin qui traversé m’amena sur les territoires de  l’Allemagne. Sur l’autre rive, la Forêt Noir plonge ces racines dans la rivière et tout de suite je prends du gaz. Cette Forêt Noir à priori fait la coquette comme dans une vue. Mais bien vite cette même forêt serra mes cuisses dans l’accession d’un de ces cols en face de singe.

 Sous la chaleur intense de midi, je fais du cuir avec ma peau. Je cuis sans ombre sur des pentes de dix pourcent. Des montées pour des litres de sueurs que la descente transforme en cristaux de sel sur mes paupières. Grisé par la vitesse, je pense à la Camargue pourtant si loin. Puis des détails de routes, des souvenirs de jours passés me montent en tête.

À la brunante trouver un lac entre deux plis et le soleil jouant des mauves avec les arbres.
L’envoler d’une horde d’oiseaux synchronisant un vol à l’unisson.
L’odeur de l’automne, les matins froids, glaner des noix d’arbres oubliés. 
Ma gourde remplie de jus de pommes; l’on m’offre à boire dans un village.
Se rappeler qu’en roulant vers l’Est l’on court toujours après son ombre.

Sur mes deux roues, mon ombre s’étire à mesure que les jours avancent.
L’automne s’installe dans la campagne et ces odeurs que j’aime tant…







C’est dans le premier du jour d’Octobre que j’ai abordé le Danube. Abordé les débuts de ce qui va être ma rivière de chevet jusqu’à la Mer Noir. Le plat prend place, les montagnes s’effacent. Ce grand fleuve d’Europe en profite pour y puiser sa source. Un fleuve qui dans ces débuts est simple ruisseau. Serpente son cours que de petits ponts partout sont posé afin de l’enjamber.

 Longeant  les courbes de ces rives, chargé comme une mule je fais du hors-piste dans les sous-bois. Traverse des champs et les glaneurs sont à l’ouvrage. Perchés haut sur les rochers, des châteaux anonymes m’observent entre les branches. Les feuilles tombent à mon passage. Un tapis jaune de sous mes roues. Et chaque matin toujours le brouillard. Un brouillard épais à couper au couteau. Un brouillard à boire. Un brouillard formant des perles de rosé sur tout mon corps.

 Ce ruisseau prend vite du courant s’élargissant de bien des sources. Les villages se condensent… les barrages se compliquent. Petit à petit tu perds le contrôle de ton propre débit. De grandes cheminées bordent tes rives et les centrales nucléaires me font peur. Des poissons géants me réveillent la nuit et les oiseaux se foutent bien de l’eau polluée pour s’y baigner. Tu suis ton cours et moi le tien.

 De par  l’Allemagne je t’ai lové jusqu’à Passau sous les torrents. Dans ce pays un brin rigide j’ai surtout vu, parlé très peu. Je mets le cap au Nord, délestant l’Est et la rivière me tourne le dos. La République Tchèque me trotte en tête… Un grand détour pour voir ailleurs que tous mes sens font la boussole.

2011/10/11


Depuis que je suis dans les campagnes de l’Allemagne au moins deux fois par jour je les vois. Elles sont partout, surtout dans ces recoins de l’improbable. Perdue dans le fond des rangs jusqu’aux embouts de maintes ruelles. Je ne sais qui les utilise, elles semblent oubliées de tous. Je ne sais encore moins qui les remplie mais toujours elles semblent pleines. Il y en a pour tous les goûts, de toutes saveurs.

En bordure d’un rail de train, j’en dépasse une.
Sur les clôtures bordant les champs, je les remarque à peine.
Seule sur le mur de pierre de ce qui semble être un bâtiment fantôme, elle fait le guet dans l’attente de menu monnaie.

Je parle ici de machines distributrices de bonbons.
Distribuant de tout, du casse-gueule en passant par les tatous gothiques. De la réglisse noir aux petits chiens toutous. Il y en a pour tous les gouts. Patiente, elles attendent et me surprennent toujours de leurs emplacements.

En voici quelques exemples :










Elles sont là pour personne et moi qui ne comprend pas...

2011/10/08



Parfois, sans ne savoir pourquoi, l’on se fait une idée bien précise d’un endroit qui nous est méconnu. Sans raisons apparentes, des images se forment dans notre tête en évoquent ces noms qui sonnent le lointain.

 Depuis l’enfance, j’imaginais la Forêt Noir comme un endroit glauque et humide. Une forêt marécageuse sur une terre plate. Où partout de vieux arbres rabougris aux branches torturées semblent vous avalez.  Une forêt aux routes minuscules, une forêt d’aucune lumière. Une forêt à si perdre. Voilà ce qu’était la Forêt Noir pour moi.

 Et bien j’avais tout faux. Il fait soleil, il fait même chaud. Les montagnes escarpées de chaque côté des routes sont dénudées en grande partie de tous ces arbres. Les cloches aux cous des vaches sonnent l’heure en permanence et ça beugle de bonheur. Des maisons robustes sur trois étages sont dispersées ci et là dans un décor enchanteur. C’est aussi le pays du nain de jardin. À croire qu’ils en ont fait leur terre d’accueil sur ces pelouses presque trop verte. Les maisons se gonflent le torse à qui met le plus de fleurs en devancade. Ça joue au coq sur des lilas. On beurre épais les bords de routes avec des roses et des fushias. J’ai l’impression de rouler dans un décor de cinéma. Dans les comtés, dans chaque village comme une odeur de lune de miel.

 Ce paysage montagnard de ces montées m’a donné faim. Me vient en tête des envies de sucre. Je salive pour du gâteau. Vous savez ce fameux gâteau dit Forêt Noire. Mais ça aussi, j’en ai bien peur, ne soit que le fruit de mon imagination…


2011/10/03

Le terroir en pleine gueule et la France dans les mollets.




C’est au bout d’une semaine de pacha qu’en Seine et Marne j’ai donné mon premier tour de roue. Un premier tour de roue dans une France de fous. Un premier tour de roue pour lentement aller toucher le bout du monde. Le grand départ se fait sans presse car l’automne débute à peine. Tracer une ligne traversant un pays sur des départementales de fond de rang. Le terroir en pleine gueule et déjà la France dans les mollets. Prendre son temps dans un pays pour moi connu. Des détours délicieux dans un pays gourmand…

 Passez les bourgs de Brie par-delà le comté de Coulommiers, je me retrouve en pleine Champagne. Côtoyer la Côte des Blancs parsemée de petits villages et de Grands Crus. À Épernay, épicentre de toute cette mousse, la ville est riche, célèbre, aristocrate. Je descendis en caves y visiter des labyrinthes taillé dans de la craie. Le sous-sol de la ville est un gruyère; des kilomètres de tunnels remplis de flacons vermeils. Des millions de bouteilles… dans l’air l’effervescence… Mais je préfère rouler en haut, entre les vignes cordées serrées.

 Par-delà Reims, je prends la clef des champs pour la Meuse au courant doux. Il faut comprendre qu’en Europe l’on appelle fleuve de petites rivières et tous  ruisseaux portent un nom de longue date. Et comme j’aime à traverser ces bouts de campagnes aux ronds valons. Petits îlots de forêts denses entre des champs de tournesols. La vache est reine de sur son tapis vert. Sous le soleil, je sus du lait cru et pète des rillettes. Cueillir des noix à mon passage et l’odeur des pommes au sol indique la saison. Faire des rencontres inattendues, dormir n’importe où et le café de chaque matin se fait si bon.

 Je quitte la plaine, la Meuse et la Moselle pour les montagnes… pour les Vosges. Deux cols plus loin les éclaires sont stroboscopes et le tonnerre un drum and bass dans mes tympans. Prendre La Bresse de front, un dernier col qui à ces pieds amène l’Alsace. La peau salée, le coup de chaleur et les vendanges sont terminées depuis longtemps. L’Alsace; de petites villes et de villages peinturlupés en  maisons de poupées. Le long des routes les crus s’affichent et moi je fais la fête sans retenu dans une Mulhouse d’étudiants.

Il ne me reste qu’à traverser le Rhin… quitter la France.
Quitter le pays du fromage pour un Allemagne donc je ne connais rien.
De l’autre côté de la rivière je vois des montagnes…